Oubliez le départ de Dez Bryant de Dallas; oubliez donc les Cowboys tout court. Ou le litige entre les cheerleaders de la NFL et Roger Goodell – rien pour faire taire les fans en boisson, eux qui le huent déjà avec véhémence. Mais oubliez surtout la mort de cette vieille succube de Madame Bush; contrairement à la XFL, elle ne risque pas de revenir. Cela dit, tentez de ne pas oublier le prix que Colin Kaepernick vient de recevoir : rien de moins que le prix Ambassadeur de la conscience 2018 d’Amnistie internationale. À la bonne heure, comme dirait l’autre.
Bref, malgré le brouhaha social du moment présent, toute l’attention des groupies ameutées de la NFL est concentrée sur le prochain repêchage de 2018, lui qui a débuté ses activités hier soir au crépuscule.
Oh oh. Mais pendant que vous aviez le dos tourné, la NFL a continué de resserrer sa poigne de fer aux dépens des joueurs qui ont jadis déposé un genou au sol durant l’hymne national et qui affichent toujours la conviction de ne pas faire honneur à cet emblème auditif maudit – incluant l’impérialisme sans empathie qu’il représente.
Colin Kaepernick est le nom que les gens retiennent comme étant le précurseur de ce mouvement. Il est d’ailleurs turbo-adulé par ceux qui ont la justice sociale à cœur, et c’est parfait ainsi. Ce que Kaepernick a accompli était courageux, certes, mais que savons-nous à propos de son ancien coéquipier, Eric Reid?
Sachez-le, Reid fut le premier joueur à déposer un genou au sol durant l’hymne national de la saison 2016.
Nous pouvons évidement parler de Reid, l’homme qui s’implique en communautés, voire celui qui tient un tournoi de golf à chaque année afin d’offrir ses bénéfices à la Fondation pour l’anémie falciforme de Baton Rouge. Ou Reid, l’homme qui a démoulé un texte d’opinion dans le New York Times, défendant ainsi son pote Kaepernick lors de sa quête vers la justice sociale. Ou Reid, l’homme qui n’a cessé de protester durant la saison 2017, et ce, sachant très bien que la NFL blackboulait Kaepernick durant cette période.
Il y a une pléiade de trucs qui font de Reid un homme de grandes convictions, forcément, mais plaçons plutôt tout notre focus sur le Reid qui excelle au football, l’athlète doué de la NFL. Entendons-nous, cet activiste dans l’âme ne fut pas un projet obscur issu des rondes de repêchage de fond de baril, et qui est soudainement sorti de nulle part afin d’éclore. Non, il aura été un dix-huitième choix au total lors de l’encan 2013 de la NFL. Il a fait ses classes dans les filiales collégiales de l’université de la Louisiane, elle qui est considérée comme une superpuissance par les recruteurs. Il n’a que 26 ans – il n’a même pas encore atteint son plein potentiel – et il est, étonnamment, toujours sans emploi.
Les choix de première ronde de la NFL ont généralement un impact immédiat chez les équipes qui les repêchent; on s’attend à ce qu’ils prennent rapidement l’avantage à leur position à travers la Ligue, rien de moins.
Et le plus beau là-dedans, c’est que Reid a répondu aux attentes. Il fut nommé au sein de l’équipe d’Étoiles (Pro Bowl) en 2013. Et le site d’analyse réputé Pro Football Focus a coté sa saison 2017 à 81,4, ce qui le place au-dessus de la masse chez ses opposants. Le site de la NFL l’a même situé au 27e rang – sur 101 – chez les meilleurs agents libres disponibles durant l’entre-saison qui sévit présentement.
Vous pouvez donc constater pourquoi le scénario diffère légèrement de celui de Kaepernick. Suite à la saison de 2016, il y avait un grand questionnement autour du quart-arrière, à savoir si Kap possédait réellement les aptitudes nécessaires afin d’opérer le poste de quart-arrière partant dans la NFL. On se souviendra que les 49ers avaient de facto bouclé la saison 2016 avec seulement 2 victoires à leur compte et 14 défaites de l’autre côté de la fiche. Sauf que, cette fois, personne ne s’interroge sur le talent et la capacité de performer de Reid, spécialement avec le fait que les 49ers ont parachevé leur dernière moisson sur une note positive, récoltant six gains sur les sept derniers matchs de la campagne, gracieuseté du nouvel arrivé Jimmy G.
Alors, pourquoi Reid n’a-t-il toujours pas signé de contrat avec une équipe professionnelle? Est-ce parce qu’il a protesté contre le « Star spangled banner » et que la Ligue tient mordicus à tuer ce mouvement dénonciateur? Oui. Est-ce parce que Reid ne veut pas promettre qu’il se tiendra éventuellement debout durant l’hymne national? Oui, et c’est là que ça devient encore plus intéressant.
En avril, Reid a obtenu une visite en tant que « agent libre courtisé » avec les Bengals de Cincinnati. Les propriétaires lui ont alors demandé s’il prévoyait s’assoir durant l’hymne, puisque ce geste allait dorénavant être prohibé. Reid n’était pas prêt à lâcher cette concession sur le champ et il a finalement quitté le bureau de penseurs des Bengals sans contrat. Il n’y a toujours pas eu de manifestation de la part d’aucune équipe afin de signer le joueur de 26 ans, lui qui est considéré, rappelons-le, comme un demi de sûreté bien au-dessus de la moyenne par les experts.
Lorsqu’un individu décide d’attaquer les injustices systématiques qui mettent en lumière les agissements de la suprématie blanche, les activistes vous diront tous en cœur qu’il faut se tenir debout pour la cause et se montrer solidaire envers cette personne. Nous agissons de la sorte pour des gens qui n’ont ni nom, ni visage connu. Nous connaissons leurs histoires, et ce, même s’ils étaient de purs inconnus auparavant.
Lorsque vous lirez ceci, espérons que vous n’aurez pas seulement qu’un nom en tête, mais surtout le visage d’un individu prêt à sacrifier sa popularité et sa fortune aux profits d’une morale aussi résistante que la carrière d’Adam Vinatieri, et des principes aussi coriaces qu’un Bruce Smith jadis en poursuite d’un quart-arrière.
Il n’occupe peut-être pas la position qui récolte ordinairement le plus d’attention de son sport, tel le quart ou le receveur; il est plutôt un demi de sûreté. Et les maraudeurs qui pivotent ce poste représentent la dernière ligne de défense du football. C’est leur job de s’assurer qu’aucun joueur offensif adverse ne parviennent à passer leur ligne et ainsi marquer un touché.
Métaphore idéale (afin de bien conclure) incluse, on peut affirmer que Reid joue la même position dans cette game de la vie. Il représente la dernière ligne de défense afin de garder les conversations entourant la brutalité policière et les injustices sociales bien actives lorsque les parties de football ont lieu. Il est temps de reconnaître son dévouement et de le supporter comme jamais.
Chacun fait sa part. Parlez-en au moins à votre facteur le dimanche, barnache!
Commentaires
Aucun commentaire