Dans les câbles – Le plus lourd secret de l’histoire | Olivier Daigneault

Salut à toi, amateur de scandale

Il y a longtemps qu’on s’est jasé, toi et moi. Désolé si je te délaisse un peu ces derniers temps. J’ai une nouvelle flamme dans ma vie et elle prend beaucoup de mon temps. C’est tout nouveau, tout beau. C’est l’fun. C’est excitant. Tu peux nous écouter, si tu veux. Les Chevaliers de la Première Ronde, le podcast dont tout le monde parle! Je t’ai délaissé un peu mais je ne t’oublie pas, cher amateur de clavier.

J’ai envie de vous parler d’un des plus grands secrets de l’histoire de la boxe. Une saga hors du commun, avec un dénouement aussi tragique qu’inattendu.

À la fin des années 80, un nouveau nom commence à se faire entendre aux quatre coins de l’Amérique. Un poids lourd caucasien, dans une catégorie où les minorités sont majoritaires et dominées par un certain Mike Tyson depuis quelques années, débute une carrière professionnelle qui le conduira vers les plus hauts sommets du monde de la boxe. Son nom, vous vous en souviendrez peut-être: Tommy Morrison.

 

Morrison à ses débuts chez les professionnels

Morrison, natif de Gravette en Arkansas, a grandi à Jay, en Oklahoma. Son père, Tim, un homme violent et sa mère, Diana, une alcoolique, ne lui offre pas une enfance dans la ouate. Très jeune, il doit quitter l’école pour travailler et aider sa mère à se refaire une vie après le divorce. Il participe alors à des compétitions de  »Tough Man Contest » contre des hommes alors qu’il n’est âgé que de 13 ans! Il jouera au football comme secondeur à son retour au secondaire, ne délaissant pas pour autant la boxe.

Il gagne les Kansas City Golden Gloves, subit la défaite en demi-finale aux National Golden Gloves et se présente aux qualifications pour les jeux olympiques de Séoul. Malgré une défaite face à Ray Mercer (qui allait remporter le titre olympique), Morrison est remarqué par John Brown, un propriétaire d’équipements de boxe, qui le convainc de commencer une carrière professionnelle. Sa carrière amateur se termine avec un bilan impressionnant de 343 victoires et 24 défaites.

Il entreprend de gravir les marches vers le podium en se battant pas moins de 19 fois en moins d’un an, se forgeant une fiche de 19 victoires au passage. Il fut remarqué par le promoteur de Mike Tyson, Bill Cayton, qui accepte de prendre sa carrière en charge. Il est aussi remarqué par un certain Sylvester Stallone qui se cherche un jeune boxeur pour jouer dans son nouveau film: Rocky 5. Il mets donc temporairement la boxe de côté pour le tournage et la promotion du film. Sa nouvelle notoriété lui vaut son lot de critiques sur le plan sportif, mais il revient vite à la compétition avec une série de victoires qui lui ouvre la porte d’un combat de championnat du monde face à Ray Mercer, celui-là même qui l’avait battu lors des qualifications olympiques.

Morrison et Sylvester Stallone dans le film Rocky 5

Après un début de combat impressionnant, Morrison, un artiste du KO rapide, court après son souffle. Mercer, lui, encaisse tous les coups de Morrison sans broncher. L’aspirant fléchit après le 3ème round, incapable de suivre le rythme et finit par se faire mettre KO par le champion Mercer. Une première défaite chez les pros qui semble le fouetter car il gagne ses 8 combats suivants par KO. Non sans amener avec lui un autre adversaire, inattendu celui-là…

Le rythme de vie de celui qu’on surnomme  »The Duke » prend une tangente auto-destructrice, l’alcool et surtout le sexe sont ses principaux vices. Son entourage est d’une très mauvaise influence et ses entraîneurs ne savent plus comment le redresser.

Morrison face à Ray Mercer

L’opportunité d’un championnat se présente malgré tout car il continue de démolir tout ceux qu’on met devant lui sur le ring. C’est nul autre que la légende George Foreman, qui tente un retour à la compétition à l’âge vénérable de 44 ans après des années loin de la compétitio

n, qui est son adversaire. Le menton de Big George est mis à rude épreuve mais il tient le coup, malgré tout. Il est toutefois incapable de toucher solidement le jeune et rapide Morrison qui remporte la ceinture des poids lourds WBO. Son rêve se réalise donc, enfin.

Il ne défendra son titre qu’une seule fois car quatre mois après l’avoir remporté, il subit la défaite face à Michael Bentt. S’ensuivit une série de combats face à des adversaires de second ordre avant que la chance ne lui sourit enfin. Donovan Ruddoch, ancien adversaire pour le titre de Lennox Lewis, veut remonter dans le ring et un combat éliminatoire est organisé. Morrison en sort gagnant et se voit offrir un combat prestigieux contre Lewis. Un combat à sens unique que Lewis dominera de bout en bout.

L’apparence physique de Morrison commence à soulever des questions des observateurs. Il semble engraisser, perd son look de blondinet  »All American Boy » et prend un coup de vieux. Il perd aussi de ses capacités dans le ring, beaucoup plus lent et facile à atteindre.

Se présente alors Don King, le promoteur controversé, qui offre un lucratif contrat de 3 combats pour 10 millions de dollars dont le dernier contre le nouvellement sorti de prison Mike Tyson. Sauf que le premier combat du contrat n’aura même pas lieu, la commission athlétique du Nevada suspend Tommy Morrison pour refus à se soumettre à des tests sanguins.

Morrison s’excuse en se disant terrifié des aiguilles, mais la vérité est tout autre. Il a contracté le virus du VIH quelque part dans l’année 1988. Il l’a su en subissant un test en 1989. En boxe, le sang et la salive sont monnaies courantes. Les athlètes infectés sont automatiquement bannis, pour préserver la santé des autres intervenants dans le ring.

Une  »mugshot » prise quelques temps avant sa mort.

Il tentera un retour peu concluant et s’associera avec le joueur de Basketball vedette des Lakers de Los Angeles Magic Johnson, lui aussi testé positif au HIV, pour parler des dangers et faire de la prévention auprès des jeunes. Il semblait se porter à merveille et prenait ses médicaments prescrits.

Il rencontra son épouse à la fin des années 2000 et son comportement changea rapidement. Il disait à qui voulait l’entendre qu’il n’avait jamais eu le virus et il abandonna sa médication pour consommer alcool, cocaïne et amphétamines. Méconnaissable, il mourut le premier septembre 2013 d’un arrêt cardiaque. Il n’avait que 44 ans.

Morrison aura menti à beaucoup de monde sur une très longue période de temps pour devenir champion du monde des poids lourds de boxe. Malheureusement, ses mensonges l’auront rattrapés.

 

crédits photos: arkansas times, rds.ca, fightbooth.com, the fight city,

 

 

Publié
6 années
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Boxe
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